Professeur et musicien, cumul d’emplois publics

Publié le : 03 septembre 20186 mins de lecture

Un professeur au sein d’un organisme public de musique peut cumuler cet emploi avec celui de musicien d’orchestre pour le compte d’une collectivité publique. Dans ce cas, la limite prévue en cas de cumul de rémunérations publiques ne s’applique pas.

En principe, les fonctionnaires ne peuvent pas exercer à titre professionnel une activité privée lucrative. Des dérogations sont toutefois prévues par l’article 3 du décret-loi du 29 octobre 1936. Ainsi, il leur est notamment permis de produire des œuvres artistiques, littéraires ou scientifiques. Par ailleurs, selon l’article 7 du décret-loi du 29 octobre 1936, un agent public ne peut exercer plusieurs emplois publics. Ce principe est assorti de dérogations. Ainsi, le cumul est possible si sa durée est limitée, s’il ne concerne pas plus de deux emplois et s’il ne porte pas préjudice à l’exercice de la fonction principale (article 7 du décret du 29 octobre 1936, alinéa 5).

Dans un arrêt du 8 novembre 2000, le Conseil d’Etat a considéré que l’interdiction de cumuler deux emplois publics ne s’appliquait pas lorsqu’une oeuvre artistique était produite pour le compte d’une collectivité publique. Il s’agissait en l’espèce d’un professeur d’une école nationale de musique qui était par ailleurs employé en tant que musicien au sein de l’Orchestre philharmonique des Pays de la Loire.

[(Depuis cette décision du Conseil d’Etat, il importe peu que l’oeuvre artistique soit produite dans un cadre privé ou public. A partir du moment où l’activité consiste dans la production d’une oeuvre artistique, ce qui inclut celle de musicien, elle échappe à la réglementation sur le cumul d’emplois.)]

Cependant, le Conseil d’Etat ne se prononçait pas sur l’application ou non des règles de cumul de rémunérations publiques. En effet, selon l’article 9 du décret-loi du 29 octobre 1936, « la rémunération effectivement perçue par un fonctionnaire (…) ne pourra dépasser, à titre de cumul de rémunérations, le montant du traitement principal perçu par l’intéressé majoré de 100 pour 100 (…) ».

Nb > Par contre, lorsque l’emploi public est cumulé avec une activité privée, la rémunération n’est soumise à aucune limite.

Saisie d’une affaire similaire, la cour administrative d’appel de Marseille a exclu l’application de ce plafond.

En l’espèce, un professeur d’enseignement artistique titulaire auprès du Conservatoire de musique de Marseille, était par ailleurs employé en tant que musicienne à l’Opéra municipal.

Cette activité de musicienne la conduisait à dépasser le montant de son traitement principal perçu au titre de son emploi de professeur titulaire au Conservatoire. Aussi, des retenues sur salaires étaient pratiquées par la ville de Marseille depuis 1996. Elle avait alors demandé au maire de l’indemniser de la perte de revenus consécutive à ces retenues. Celui-ci ayant refusé, elle avait saisi les tribunaux.

[(La cour administrative d’appel a rappelé que « l’activité de musicien d’orchestre doit être regardée comme une production d’oeuvre artistique au sens de l’article 3 du décret-loi du 29 octobre 1936 ». Selon elle, cet article « exclut clairement et globalement une telle activité du champ d’application de l’ensemble des règles relatives au cumul d’emplois et de rémunérations ».)]

Par conséquent, un professeur au sein d’un organisme public de musique qui exerce par ailleurs une activité de musicien d’orchestre ou d’opéra pour le compte d’une collectivité publique, peut cumuler ces deux emplois. Dans ce cas, le plafond prévu en cas de cumul de rémunérations publiques ne s’applique pas.

La cour administrative d’appel a ainsi rejeté l’argument de la ville de Marseille selon lequel même si le Conseil d’Etat, dans sa décision du 8 novembre 2000, a admis la possibilité de cumuler l’emploi de professeur avec celui de musicien d’orchestre, cette reconnaissance ne conduit pas pour autant à l’inapplication des règles relatives au cumul de rémunérations.

La ville de Marseille a donc été condamnée à restituer les retenues sur salaires, ce qui représentait la somme de 199755,67 francs. Elle n’a pas exercé de recours contre cette décision devant le Conseil d’Etat.

[(La cour administrative d’appel de Marseille a ainsi apporté des précisions sur un point qui n’avait pas été éclairci par le Conseil d’Etat.)]

Cependant, si une affaire similaire était jugée par une autre cour administrative d’appel, celle-ci pourrait avoir une position différente. En effet, les décisions prises par cette juridiction ne s’imposent pas aux autres tribunaux. De même, le Conseil d’Etat, s’il venait à être saisi sur cette question, ne confirmerait peut-être pas la non application des règles de cumul de rémunérations publiques.

Plan du site