Activité salariée (contrat de travail) ou non, participation à la promotion d’un film

Publié le : 03 septembre 20186 mins de lecture

Conseil de prud’hommes de Perpignan, 5 novembre 2003, Lopez c/ SARL Les films du losange

N’est pas lié par un contrat de travail avec la société de production, le personnage principal d’un film qui a participé à la promotion de celui-ci lorsque les conditions d’exercice de cette activité n’établissent pas l’existence d’un lien de subordination.

Un documentaire avait été réalisé dans une classe unique (classe composée des plus petits élèves aux grands du CM2). Le personnage principal, l’instituteur, avait ensuite participé aux opérations de promotion (voyages, interviews, débats).

Estimant que cette activité s’inscrivait dans le cadre d’un contrat de travail, il avait saisi les tribunaux afin que soit reconnue l’existence d’un tel contrat entre lui-même et la société de production et qu’une rémunération lui soit accordée.

Pour la jurisprudence, le contrat de travail est caractérisé par trois éléments :
– l’exécution d’un travail ;
– le versement d’une rémunération (qu’elle soit versée en argent ou en nature, qu’elle soit calculée au temps, aux pièces ou à la commission) ;
– la subordination juridique.

Ainsi, les juges du Conseil de prud’hommes ont d’abord relevé qu’à l’origine, aucune rémunération n’avait été discutée entre l’instituteur et la société de production.

Ils ont en outre constaté que par courrier, la société avait proposé ultérieurement à l’instituteur une indemnité, admettant ainsi sa participation à la promotion du film.

Par conséquent, l’instituteur avait bien effectué un travail ; cependant, l’existence d’un lien de subordination entre la société et lui faisait défaut.

En effet, selon la jurisprudence, la subordination juridique se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

A l’appui de sa demande, l’instituteur avait fourni le planning de programmation des débats et des interviews. Cependant, les juges ont estimé que ce planning ne prouvait pas à lui seul que la société lui imposait des directives et des contraintes.

Pour eux, ce planning ne correspondait qu’à une simple programmation de débats et d’interviews.

L’instituteur était donc :
– complètement libre de ses mouvements ;
– libre d’accepter ou de refuser les propositions qui lui étaient faites ;
– libre de choisir les villes dans lesquelles il désirait se rendre.

Pour les juges, la totale liberté dont l’instituteur disposait faisait obstacle à la reconnaissance d’un lien de subordination. Il n’y avait donc pas contrat de travail entre l’instituteur et la société de production.

Par contre, dans d’autres cas, la relation de travail a pu être qualifiée de salariat dans la mesure où ont été rapportées des preuves de l’existence de directives, assortie d’une obligation de respect et, le cas échéant, de sanctions.

Ainsi, un contrat d’engagement volontaire conclu avec une association a été requalifié en contrat de travail car celle-ci et son responsable étaient donneurs d’ordres et de directives. En outre, l’association disposait d’un pouvoir de sanction (Cour de cassation, chambre sociale, 15 octobre 1998, Pinson et autre c/Association Société Humanitaire).

Pour aboutir à cette conclusion, les juges avaient constaté que :
– les personnes signataires du contrat s’étaient engagées dans celui-ci à se conformer aux instructions, règles de conduite et directives émanant de l’association et de son responsable, ainsi qu’à respecter la charte morale de l’association ;
– celle-ci se réservait la possibilité de mettre fin au contrat en cas de non respect de ses clauses.

De même, un contrat de développement a été considéré comme étant un contrat de travail car les documents fournis aux juges leur avaient permis de relever :
– que le signataire du contrat était placé sous l’autorité d’un responsable qui prévoyait le travail à faire ;
– qu’il exerçait son activité selon un horaire fixé par la société et qu’il se devait de respecter ;
– que la société déterminait la charge de travail imputable à chacun et fixait les dates auxquelles les travaux devaient être rendus.

Les juges avaient déduit de ces éléments que le signataire du contrat était soumis à des directives données par la société et qu’il avait l’obligation de les respecter (cour d’appel de Versailles, 10 décembre 1998, arrêt n° 662).

Ainsi, tout document (convention, courrier…) permettant de prouver que le travail effectué revêt un caractère obligatoire, et que la personne est soumise à des directives dont le non respect est susceptible d’être sanctionné, peut conduire à la reconnaissance d’un contrat de travail.

En l’occurrence, l’instituteur n’apportait pas cette preuve ; sa demande de versement d’un salaire a donc été rejetée.

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